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MER : Derrière le drame écologiste, une ode à l’ingéniosité humaine (Le Journal du dimanche)

Dans « Mer », de Raphaël De Andreis et Bertil Scali, le changement climatique précipite des milliers de migrants dans le chaos. Certains disparaissent mystérieusement…


Voici un écopolar qui ne désespérera pas ses lecteurs et qui derrière sa noirceur lève un vent d’optimisme. En 2050, la montée des eaux a rayé de la carte des pays entiers tandis que des incendies monstres ont ravagé l’Australie. Bordeaux, devenu une cité lacustre et marécageuse, accueille de nombreux réfugiés. Mais mille d’entre eux disparaissent sans raison. L’enquête est confiée à deux flics aux états de service aussi minces que douteux. Ils vont, un peu par hasard, tirer un fil et ne plus le lâcher. Celui-ci les mettra aux prises avec de diaboliques organisations, des sociétés secrètes, des marchands de sommeil, une famille de viticulteurs fortunés et des trafiquants en tous genres. Ainsi qu’avec des héros du quotidien aux actes de bravoure parfois hauts en couleur.


Mer pose la question de la survie dans un monde devenu hostile. Jusqu’où a-t-on le droit d’aller pour sauver sa peau et celle de sa famille ? Quelle petite magouille ou grande manigance peut-on mettre sur pied pour échapper à la mort ?


Les bas-fonds de Bordeaux


Roman d’anticipation ou pur fantasme de deux auteurs préoccupés par les questions environnementales, le livre montre également que les migrants de demain – que les auteurs rebaptisent migrateurs – seront des hommes et des femmes aisés, bien éloignés des damnés de la terre d’aujourd’hui. Les Australiens deviennent la main-d’œuvre à bon marché d’une ­Amérique qui ne veut pas renoncer à son confort, pas plus qu’à son mode de vie.


Ce livre est également une ode à l’ingéniosité et à la débrouillardise humaines. Les dirigeables solaires viennent remplacer les avions. Même avec une température qui s’élève de 4 degrés, on parvient à reconstituer un petit univers, un train-train quotidien, une vie presque normale : on dîne en amoureux, on boit des graves blancs, on roule en Alpine, on continue de s’amuser… La Norvège devient une nouvelle Côte d’Azur où il fait bon vivre et se montrer…


Les spectaculaires descriptions de Bordeaux envahi par les eaux doivent beaucoup à Bertil Scali, Parisien qui a élu domicile il y a quelques années dans la capitale de la Gironde. L’intrigue bien tissée nous fait pénétrer dans les bas-fonds de la ville comme dans les secrets des conclaves où se dessine l’avenir du monde et des pauvres hères qui se battent pour survivre. Mer est un roman addictif et instructif.


Jérôme Béglé


Mer, Raphaël De Andreis et Bertil Scali, Cairn, 378 pages, 11,50 euros.

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